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Une municipalité, une histoire | Authier-Nord

11 juillet 2025

Authier-Nord

Parcourir Authier-Nord en canot, c’est faire entrer en soi à chaque tournant la beauté du paysage touffu des bosquets qui frôlent l’eau. Parcourir Authier-Nord en voiture, c’est la surprise du tunnel de souvenir que représente le splendide pont couvert Levasseur. La signalisation touristique vous y invite. Il offre un moment d’arrêt propice au recueillement en quatre saisons. Si vous êtes accros à sa beauté, à son histoire et à l’effet qu’il vous fait, votre estomac vous rappellera que vous y êtes depuis longtemps. Le magasin général/épicerie Chez Roger Plante 2.0 vous servira de quoi manger, vous dépanner et vous renseigner sur ce qui vous intéresse. Et vous n’êtes pas seul à être inspiré par le calme rural d’ici puisque quatre écrivains ont fait pousser des romans prisés à Authier-Nord, dont Claire Bergeron, Cécile Hélie et Bernard Deslongchamps. C’est tout dire. Avec près de 300 personnes, Authier-Nord qui a célébré ses 100 ans en 2022, est aussi le lieu d’habitation de Jacques Demers, Michel Bergeron, Marguerite Bourgeois, ainsi que Dollars Desormeaux. Toutefois, à défaut d’avoir ces vraies célébrités comme résidents, on a des gens qui portent bel et bien le même nom qu’eux (des homonymes). Quant à elle, Dominique Michel a fait le contraire en changeant son nom puisqu’elle s’appelait Aimée Sylvestre. Voulait-elle garder son vrai nom disponible pour d’éventuels romans de fiction d’Authier-Nord où sa parenté proche se trouve? Encore là, il y a de quoi inspirer, tout comme le coureur automobile et dessinateur Bruno Wurtz dont la légende de ses exploits dépasse dans les faits tout ce qu’on pourrait même tenter d’écrire sur son sujet.

Au niveau municipal, dans ce village qui dû s’y prendre par deux ou trois reprises avant d’avoir son existence propre au milieu de ses voisins au début des années 80, nous étions aussi dans la dualité d’ouvrage entre l’agriculture et la foresterie. Le Chemin de la Cache tire son nom de la Cache à Bienvenue, sorte d’entrepôt de bois et point de ravitaillement du nom de famille de l’entrepreneur forestier majeur qui possédait un gros moulin à scie à La Sarre. Après un long séjour en réclusion, les hommes sortaient par ici pour aller retrouver leur conjointe. Un potin d’antan raconte qu’un homme retardataire serait resté des heures, voir des jours de plus, près de la cache en se trainant les pieds parce que, contrairement aux autres, il n’avait pas hâte du tout de retrouver sa femme! Côté agricole, les terres sont propices au fourrage depuis longtemps et quelques fermes s’en servent pour nourrir leurs animaux qui s’en pourlèchent. Le centre de ce village ponctué par plusieurs croix de chemin avait commencé à être installé à l’embouchure du lac Macamic, mais fut finalement placé à un endroit plus central pour les rangs.

Sur l’histoire beaucoup plus ancienne, les peuples des Premières Nations Anishinabe (algonquin) et Eeyou (cri) passaient par ici pour faire le pont entre deux des trois grandes artères canotables Nord-Sud (véritable autoroute d’eau) qu’étaient l’axe Lac Témiscamingue-lac Duparquet-Lac Abitibi-Rivière Abitibi et l’axe Lac Demontigny-Lac La Motte-Rivière Harricanna. Ce passage pendant des centaines, voire des milliers d’années, pour traverser d’Ouest en Est suivi d’un portage important avant d’arriver au Lac Chicobi, valait le coup. Aujourd’hui, une croix au bord de l’eau chez un résident à l’embouchure de la Rivière White fish (Wabakin) rappelant une ancienne sépulture autochtone plus que centenaire, n’a donc rien de surprenant.

En terminant, dans votre incursion temporaire ou définitive sur le territoire d’Authier-Nord, sachez que le trésor modeste et le secret le mieux gardé se remarque en hauteur. Il se voit et il s’entend. Il s’entretient soigneusement, incognito, une petite famille à la fois. C’est romantique à souhait. Ce sont les oiseaux. Aucune autre municipalité d’Abitibi-Témiscamingue n’a autant de cabanes d’oiseaux installé sur son territoire. Tous les chemins de rang en ont plusieurs sur les poteaux. Plus d’un résident sur deux en a au moins une sur son terrain. C’est sans compter les mangeoires. La famille Gagnon comportait, depuis de nombreuses années, un de ses membres qui fabriquait de superbes cabanes d’oiseaux artisanalement qui se sont vendues en masse au magasin général, tandis qu’un autre qui travaille à l’UQAT a étudié les populations d’oiseaux pour se faire défenseur aguerri de la cause. L’ancienne propriétaire du magasin général n’hésitait pas à prendre des pauses spéciales, jumelles optiques en main, pour aller observer un oiseau rare de passage. Les hirondelles voltigent gaiement en cirque aérien dans le ciel d’ici en glanant les mouches en trop. Elles se savent désirées et tous profitent de leurs bienfaits. Le plus surprenant, c’est que bien des habitants ne savent pas que leur dévouement individuel et collectif subtil pour la faune ailée distingue tout particulièrement Authier-Nord. Un secret n’est jamais aussi bien gardé que lorsque son détenteur ne se doute pas qu’il l’a. Chose certaine, à Authier-Nord, une hirondelle fait le printemps.

Un texte de Guillaume Beaulieu

Ce projet a été réalisé grâce au soutien financier du ministère de la Culture et des Communications.