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Palmarolle | Une municipalité, une histoire

26 décembre 2025

Palmarolle

Village qui transpire la fierté depuis des générations, Palmarolle ne s’est jamais contenté de s’asseoir sur ses acquis. Il est précurseur des bonnes idées de demain, proactif ici, maintenant et toujours soucieux de son apparence et de ses fondements. À de durs coups de la vie, Palmarolle a toujours su rebondir grâce à des élans familiaux et collectifs qui gardent le corps et la tête en mouvement, quitte à faire des gains pour la ruralité ou la région en entier. Palmarolle est réseauté et sait entretenir ses contacts à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières. La densité de population et sa géographie avantageuse permettent de faire pousser plusieurs commerces de proximité, tandis que la fierté locale permet de les faire vivre durablement et même d’en voir apparaître d’autres plus rares. C’est sans compter les fermes ambitieuses sur les terres riches qui prospèrent en gardant bien attaché le fil des générations ou des métiers. Les Fermières en cercle ayant tricotté un foulard géant exhibé à l’avant de la salle communautaire, en fait foi. Il est normal de voir les voitures des touristes en cortège traversant le village, ralentir beaucoup ici. Il y a tant à regarder et à faire! Ici, on s’instruit jusqu’en deuxième secondaire sans quitter le village, on arrête des rondelles à l’aréna en se prenant pour le célèbre Rogatien Vachon qui vient d’ici, on achète nos matériaux de construction au meilleur prix en région, on transige financièrement, on mange nos produits locaux achetés au marché public ou dans notre épicerie neuve et spacieuse, on monte des murs préfabriqués, on fait fleurir des tonnes de jardinières en été et des bouquets de lumières de Noël en hiver, on amarre nos bateaux au quai public… et ce n’est qu’un échantillon. On entre au village dans une descente comme dans une coupole géante qui dit qu’on est tous rassemblée, on tourne à gauche sur la 12e avenue pour une merveilleuse promenade de ressourcement en forêt au Domaine Roch Paradis. On traverse la rivière Dagenais en rêvant au lac Abitibi, on s’arrête à la chapelle de Notre-Dame de la Confiance pour un moment de recueillement, puis on ressort de la coupole du village en regardant par le rétroviseur, en regrettant un peu. Tant qu’à éprouver le regret du départ, simplifiez-vous la vie, faites demi-tour et installez-vous à demeure à Palmarolle.

Plusieurs personnes à Palmarolle furent piquées par un goût du détail et l’amour de l’ouvrage bien fait. Sandra Plourde, grande gagnante de l’émission MasterChef 2024, doit en partie son succès à la minutie et au sens de l’observation qu’il provoque. C’est aussi le cas des ébénistes de talent qui créent du beau et du solide en bois, des artisans qui fabriquent de l’utile joliment orné, des auteurs habiles à placer les mots et que dire du coup de pinceau de Louisa Nicol dans sa galerie d’art où elle révèle ses techniques à des apprentis. Au sein des réunions pour mener un projet à la réussite, ce goût du détail émerge chez les leaders locaux pour ne rien échapper et pour maximiser les fruits du succès, jusqu’au rayonnement.

Parlant de la capacité à rebondir solidairement face à des calamités, l’illustration des suites de l’ouragan de juillet 1967 dans le Rang 7, est éloquente. Après 3 minutes de tornades, il n’y a plus aucun poteau de téléphone debout et le transformateur va s’échoir au bout du champ. Toutes les granges lèvent et la plupart font un voyage à des centaines de mètres de là pour finalement s’écraser sur les champs dépeignés. Personne n’est épargné. Rosaire Lemieux et Yvette Gosselin qui viennent de reprendre la ferme paternelle, reçoivent à la chandelle pour leur noce. L’effort collectif fut phénoménal. Tous les agriculteurs ont reconstruit, en grande partie grâce aux corvées collectives et des dons des citoyens d’Abitibi-Ouest. Rosaire a passé son voyage de noces sur les toits des granges du rang 7 à installer de nouvelles toitures rondes comme le suggérait M. Proulx de Saint-Janvier-de-Chazel, permettant de faire vite et solidement, mais à moindre coût. On imagine un peu à quel point un événement de la sorte soude ensuite un coin de pays comme celui-là. Pour preuve, en voici la suite : en 1968, Rosaire et Yvette agrandissent un peu plus leur domaine, mais ils constatent qu’ils auront à nouveau besoin de sortir « leur front de boeuf » pour faire face à Dame Nature. Au moment de faucher les grandes cultures d’avoine, d’orge et de blé pour les bêtes, il pleut presque sans arrêt durant 2 semaines consécutives. Impossible de faire le travail. Rendu là, les 12 producteurs agricoles du rang vont perdre leurs récoltes (grand total de 128000$ en valeur d’aujourd’hui) et, à l’époque, il n’y a pas d’assurance qui couvre cela. À ce moment, M. Mercier, qui vend de la machinerie agricole au village, est pris avec une petite moissonneuse-batteuse de 11 pieds de large, invendue en fin de saison. Il vend au tiers du prix. Est-ce que c’est possible de récolter un peu avant que l’hiver s’installe? Pari risqué! Rosaire, avec son frère et un voisin, décident d’acheter. Au moment de sortir de la cour avec son achat le 31 octobre, il neige à gros flocons. On se dit que c’est probablement foutu. Or, le lendemain, et pour les deux semaines d’ensuite, « l’été indien » se pointe. Temps clément. Doux et sec. Rosaire se met à récolter comme un déchainé! En passant la machine jour et nuit avec son frère sans arrêter, ils finissent par récolter tous leurs champs et aussi ceux de tous leurs voisins, en réchappant leur revenu contre un salaire presque symbolique de 8$/h. Sur un risque à prendre, on a fait sauver 120 000$ aux agriculteurs du coin. Qu’on se le tienne pour dit : « Avoir du front, c’est bien. Avoir du flair, c’est encore mieux! » En 1977, lors de la victorieuse visite de terrain en Abitibi-Témiscamingue du nouveau ministre de l’agriculture Jean Garon, le convainquant de ne pas fermer l’agriculture de la région, on lui a fait visiter des fermes de Palmarolle. En repartant, il aurait regardé dans son rétroviseur avec un certain regret de devoir partir. L’effet Palmarolle fonctionne encore.

 

Un texte de Guillaume Beaulieu 

 

Ce projet a été réalisé grâce au soutien financier du ministère de la Culture et des Communications.